Derrière la toile

« Une femme retire sa chemise, qui laisse voir une autre chemise qu’elle retire, qui laisse voir une autre chemise, qu’elle retire, qui laisse voir une autre chemise, et le repos de la nudité n’arrive jamais ».

La vie dans les plis Henri MICHAUX






DERRIÈRE LA TOILE


Ici la toile est pensée comme écran, où se projettent les images de notre imaginaire en marche, avec toute l’ambiguïté entre la toile, l’écran, la peau des corps, la peau du temps, mais aussi toute l’incertitude entre la place du réel et de sa représentation, si propre à la photographie.
« Le plus profond c’est la peau » nous dit Paul Valéry, il y a dans cette série d’images, une métonymie, entre peau et peinture qui pourrait se concrétiser dans le mot « incarnat ».
Il s’agit de mêler peinture et réel, comme peut l’opérer chaque spectateur devant une œuvre, en y introduisant sa culture, sa sensibilité, ses souvenirs et notre mémoire, comme l’étape d’une anamnèse, où le refoulé resurgit sans cesse.
Nous sommes tentés également de gratter derrière les couches successives de peintures, que pourrait comporter le tableau, d’en faire en quelque sorte une radiographie, de procéder à un jeu d’addition et de soustraction d’épaisseurs, de plonger dans une problématique pelliculaire. Nous partons d’une œuvre qui nous touche, et en créons une succession d’autres images, dans cet état onirique où nous plongent certaines œuvres.
Les pistes, les valeurs sont brouillées, la peinture semble occultée, oblitérée et pourtant parfois décryptée, par un travail qui est aussi de dévoilement, pour aller derrière l’apparence première, et atteindre un secret hypothétique. Les choses naissent parfois d’un brouillard informe, querelle entre l’art et la vie.
Les repentirs de l’artiste sont investis par le spectateur, et ici par le photographe afin d’en imaginer d’autres scénarios.









« L’artiste vit un secret qu’il lui faut manifester.
La plupart poursuivent une possession. Ils ne savent pas que la possession est impossible.
Je sais fort bien qu’une toile ne peut être qu’une chose bizarre, incompréhensible ».

BRAM VAN VELDE